Une coopérative d’expertise comptable et financière qui fait une
entrée remarquée dans le milieu feutré des professions du chiffre.
Mathieu Castaings a 29 ans, mais il est déjà un vieux compagnon route de Minga. C’est par l’intermédiaire d’un ami, Manuel Irogoyen, gérant d’une épicerie alimentaire souhaitant soutenir l’économie de proximité au Pays Basque, que Mathieu a eu connaissance de Minga. Souhaitant s’immerger au sein de filières équitables et biologiques, il réalise son premier stage de comptabilité au sein de la SCOP Andines en 2008, au milieu d’un périple en auto-stop autour du monde de 7 mois qui l’amènera à cofonder Afinida, un réseau de volontariat international. En 2010, il rejoint le conseil d’administration de Minga, où il exerce le mandat de trésorier, fonction qu’il occupe toujours. En 2012, il crée avec des amis un club CIGALES (Club d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l’Epargne Solidaire) puis exerce des mandats sociaux de trésorier au sein de ce mouvement d’épargne solidaire, à l’échelle régionale puis nationale.
Après avoir obtenu son diplôme d’expert-comptable en 2015, c’est naturellement que Mathieu s’attache à exercer son métier dans le prolongement de son engagement pour une économie sociale et solidaire. Comme une évidence, l’idée de créer une coopérative emerge puis se précise. Il tient à fonder une SCIC (société coopérative d’intérêt collectif) afin d’y associer les salariés, experts-comptables ou non, mais également ses clients et ses partenaires par le biais de collèges d’associés. Mais le 25 septembre 2015, l’Ordre des Experts-Comptables de Paris Ile-de-France signifie un refus d’inscrire la SCIC SAS FINACOOP au Tableau de l’Ordre. Concrètement, cela entraîne l’impossibilité d’exercer son activité d’expert-comptable dans le cadre d’une coopérative. Ce qui est reproché n’est rien de moins que l’objet social (et non la forme juridique) d’une SCIC qui, selon la Loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 doit prévoir « la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale. ». Sans expliciter plus précisemment le motif de son refus, l’Ordre des experts comptables de Paris-IdF pointe la notion d’utilité sociale qui présenterait selon lui un « risque d’incompatibilité » avec le cadre déontologique de la profession. L’autre motif de refus portait sur le fait que la société coopérative risquait de ne pas être uniquement contrôlée par des experts-comptables; argument facilement opposable en raison des collèges d’associés experts-comptables, travailleurs ou partenaires, détenant 70 % des droits de vote.
Derrière ce refus non motivé se révèle toute la tradition d’une profession qui se pense encore en notable de la IIIème République, garante de l’ordre économique dominant fondé sur la préservation d’un patrimoine et la privatisation des moyens de production. Dans cette tradition encore bien vivace, la performance et l’intégrité en économie se confondent avec la recherche du profit tandis que le social se limite à un supplément d’âme. Pas étonnant que, dans ce contexte, certains des confrères de Mathieu, considèrent son engagement comme un argument commercial déployé pour exploiter une niche de marché. Pas franchement étonnant non plus que la profession soit vieillissante (52 ans de moyenne d’âge) et connaisse des difficultés à attirer des jeunes.
Contestant cette décision, la jugeant discriminatoire et en violation avec la Loi ESS (Économie Sociale et Solidaire) de 2014 de même qu’avec la liberté d’entreprendre consacrée par le Conseil Constitutionnel et l’Union Européenne, Mathieu sollicite un recours auprès du Comité National du Tableau de l’Ordre des Experts Comptables qui rendra finalement un avis favorable en audience publique du 30 mars 2016, ce qui permet depuis à FINACOOP d’ exercer son activité.
Les compétences, relations et engagements de Mathieu assurant déjà à FINACOOP une activité importante, cela l’encourage vite à embaucher deux personnes. À moyen terme, la coopérative s’achemine vers la création de deux bureaux (un à Paris, l’autre près d’Anglet dans le Sud-Ouest d’où Mathieu est originaire…). Car même si l’on peut faire beaucoup par internet, la relation de proximité, d’humain à humain, est indispensable par rapport à la nature des activités portées, mais également pour travailler en cohérence avec l’objet social de FINACOOP.
Outre les activités comptables classiques, FINACOOP souhaite développer des activités de formation et d’expertise stratégique (financière, juridique, numérique, …) pour accompagner le développement de ses clients sans perdre de vue leur objet social ni l’embaumer. A terme, et en lien avec la coopérative Libre Informatique, également membre de Minga, FINACOOP souhaite notamment contribuer à l’élaboration de logiciels libres de comptabilité-gestion qui permettront aux usagers de rester maîtres de leurs données économiques et sociales. À l’ère du Big data, ce n’est pas le moindre des défis.
FINACOOP – Coopérative d’intérêt collectif (SCIC SAS) d’expertise comptable et financière
Paris : 11 rue du Croissant – 75002 Paris
Pays Basque : 3 rue Renau d’Elissagaray – 64500 Saint-Jean-de-Luz