Archives de catégorie : Alimentation

Le devenir des ruralités est l’affaire de tous les habitant·e·s de Bretagne.

Laurent Vanhelle

Minga, en tant qu’organisation du monde du travail et des métiers, soutient le collectif d’habitant·e·s « Ensemble c’est tout » du village de Canihuel (une commune bretonne située en Argoat, dans le département des Côtes-d’Armor) en cosignant la lettre ouverte aux élu·e·s de cette commune : « Ouvrons le dialogue ».

Face à une crise sanitaire qui met nos nerfs à rude épreuve, face aux replis sur soi, l’initiative qu’ouvre, à son échelle, le collectif d’habitant·e·s « Ensemble c’est tout » est essentielle, car c’est bien le devenir de toutes les ruralités bretonnes qui se joue ici.

Depuis des décennies, les territoires ruraux subissent l’effondrement continu de la population active agricole et l’affaiblissement systématique des services publics de proximité. C’est cette pente infernale qu’il faut inverser.

Pour avoir encore le droit de vivre et travailler dans les ruralités en Bretagne, il est vital de développer des activités, des emplois notamment autour de l’alimentation, de la santé, de l’éducation et de la culture.

Parce que nos lieux de vie et d’activités ne sont pas hors sol, la maîtrise du foncier rural bâti et non bâti est tout aussi cruciale.

En cosignant cette lettre ouverte, nous sommes prêts au dialogue pour faire front ensemble, ruraux et urbains solidaires afin que le devenir des ruralités se conjugue au devenir humain et démocratique de la Bretagne.

Minga le 10 mai 2021

Canihuel LO vf

Journalisme : « au dessus » , « en dessous » ou « dans » le monde du travail et des métiers ?

« La question en France n’est plus aujourd’hui de savoir comment préserver les libertés de la presse. Elle est de chercher comment, en face de la suppression de ces libertés, un journaliste peut rester libre. Le problème n’intéresse plus la collectivité. Il concerne l’individu. »

Albert Camus – « Manifeste du journaliste libre » novembre 1939

Dès qu’une ou un journaliste aime son travail et le fait bien, elle ou il révèle forcément des vérités qui dérangent. Ce n’est malheureusement pas si fréquent, tellement la presse est sous le contrôle de quelques grands groupes capitalistiques et influencée par les annonceurs publicitaires, qu’ils soient privés ou institutionnels. La précarité de cette profession et la faiblesse des rapports de force syndicaux, comme dans tant d’autres professions, conduisent parfois à opter pour la résignation. Mais quand informer et communiquer viennent à se confondre, c’est le sens même du métier de journaliste qui disparaît.

Fort heureusement, dans ce flot continu de communication, il existe des journalistes qui aiment leur métier et savent entendre ce qui est caché, les expressions singulières étouffées par le brouhaha, des expressions qui peuvent remettre en cause des intérêts dominants. Mais elles ou ils sont alors vite taxé.e.s de « journalistes militants », notamment par leurs confrères «éditorialistes» qui confondent neutralité et complaisance et aiment citer Albert Camus, tout en considérant qu’un bon journaliste n’est pas un travailleur comme les autres, qu’il doit avoir une position de surplomb, même quand ces sujets sont vitaux.

Si toutes les paroles de victimes ne sont pas des paroles de vérité, le travail d’enquête d’un.e journaliste, quand il est bien fait, permet précisément de prendre de la distance, de rendre apparent un fait de société dans un sujet et d’éviter le pathos racoleur en respectant la dignité des personnes, quelle que soit leur position sociale. Alors l’information devient subversive… Alors le travail du journaliste sera discrédité si ce n’est carrément entravé par des menaces ou des plaintes en diffamation pour défendre une omerta.

Que ces plaintes aboutissent ou non à un procès (les plaignants se désistant souvent quelques jours avant pour éviter la lumière sur leurs pratiques), pour un.e journaliste, être l’objet d’une plainte en diffamation entraîne des mois de travail pour préparer sa défense, et celle du média qui a diffusé son article, plutôt que d’exercer son métier. Et cela oblige aussi à exposer des témoins, des sources, qui voulaient rester anonymes.

Ca a été le cas de la journaliste Ines Leraud qui a enquêté sur le sujet des « algues vertes » en Bretagne, ainsi que sur les pratiques commerciales et managériales frauduleuses du grossiste en fruits et légumes « Chéritel » qui ont fait l’objet d’un article publié en mars 2019 par le média en ligne Basta!

6 jours avant le procès pour diffamation qui devait avoir lieu le 28 janvier, le groupe « Chéritel » retire sa plainte.

Si la séquence judiciaire de cette affaire est terminée, l’aspect politique du dossier demeure. Et là, cela engage toute la société, et pas seulement la profession de journaliste. En effet, de quelle marge de manœuvre dispose un·e journaliste, souvent précaire, face aux pressions subies, quand l’engagement syndical est si faible? La liberté de la presse, n’est pas une affaire de principe pour une corporation, mais aussi une affaire d’organisation pour la défendre. Cela engage l’ensemble de la profession à se positionner avec le monde du travail et des métiers.

Minga, le 27 janvier 2021

A écouter « Agroalimentaire, l’omerta règne dans une Bretagne sous tension » le reportage de Radio Parleur du 27/01/2021 https://radioparleur.net/2021/01/27/ines-leraud-cheritel-proces-bastamag-agroalimentaire-pression/

Des soupes pour réchauffer nos humanités et entretenir une biodiversité cultivée

L’Association «Graines de Liberté» vise à la création d’un établissement semencier qui commercialisera des semences Variétés Populations, cultivées en Bretagne par des maraîchers co-acteurs du projet. L’un d’entre-eux devait sacrifier des courges pour leurs graines. Des adhérents de L’Alliance des Cuisiniers et Cuisinières Slow Food, co-fondateur du projet, se sont chargés de les transformer en soupes. Ainsi, ils ont élaboré 2 recettes à partir de butternuts et de potimarrons Green Hokkaïdo.

Les bénéfices des ventes iront à l’association «Graines de Liberté – Hadoù ar Frankiz »

Ces soupes sont disponibles auprès chez «Les Semeuses», épicerie vrac bio à Quimper, 6 place du 118ème R.i., https://fr-fr.facebook.com/LesSemeusesQuimper/

Les Maraîchers de la Coudraie 271 Route de Guengat, Quimper https://panierbiolacoudraie.org/
et auprès de l’association «A vos papilles» dans le Cap Sizun https://www.avospapilles.fr/accueil/

tous les samedi matin au marché de Quimper, par Stéphanie « des Fruits des Fleurs »

Marjorie - des Semeuses à Quimper

La pépinière biologique « Des fruits, des fleurs » adhère à Minga !

A travers le récit de son itinéraire personnel et professionnel, c’est une conviction forte que partage aujourd’hui Stéphanie fondatrice de la pépinière « Des fruits, des fleurs » : celle d’approfondir notre humanité par une relation aux plantes, sensible et pensée.`

« Avant d’exercer le métier de pépiniériste, j’étais formatrice en prépa kiné à l’institut régional sport et santé de Rennes. Pendant 12 ans, j’ai accompagné 5 classes de 40 élèves dans la préparation de l’épreuve de Sciences Physiques du concours. Il fallait créer dans les groupes une émulation telle que les élèves parvenaient à un niveau de performance et d’autonomie incroyable ! Je pouvais alors me retirer et n’intervenir qu’auprès des étudiants qui avaient encore besoin d’une aide personnalisée. J’ai adoré ce contact avec les jeunes ! C’était plus un métier de coach que de prof. Le rythme était extrêmement soutenu avec des tranches de 4 heures de « cours », des devoirs surveillés chaque semaine, des concours blancs 4 fois dans l’année ! On imagine pas le travail de préparation et de correction qui correspond, d’autant que chaque étudiant aime se sentir unique et qu’il faut personnaliser les corrections afin de mettre en lumière les points forts et les points faibles de chacun. Mon année de travail était concentrée sur 7 mois, de septembre à avril, ensuite les étudiants partaient pour une longue série de concours… Et pendant ce temps, je cultivais mon jardin.
J’ai quitté Rennes devenue trop chère pour m’installer avec mon fils de 4 ans à 35 km de là, en zone rurale. A l’époque, je louais une maison en terre et pierres ainsi qu’un terrain agricole où j’avais décidé de faire un potager de 2000 m2, avec 2 serres, des légumes, des petits fruits et des fleurs. J’ai commencé à la grelinette et j’ai récupéré des plants en échange de coups de main que je donnais à des maraîchers… Je savais déjà que je n’allais pas continuer d’être formatrice, pour plusieurs raisons…

  • travailler dans un secteur qui favorise la compétition, la sélection, l’élitisme, devenait trop difficile pour moi : accompagner les élèves suppose aussi de les soutenir dans les moments difficiles. Avec le stress et cette ambiance de concours, certain(e)s d’entre eux développaient des pathologies psychosomatiques : anorexies, crises de tétanie, burn out, dépressions pouvant aller jusqu’à l’hospitalisation, addictions… En les écoutant et en essayant de leur parler, je me rendais compte que j’étais complice d’un système déshumanisant et que cette stratégie du mérite frappait injustement des jeunes qui allaient jusqu’à perdre totalement confiance en eux et risquer de sombrer. Cette démarche allait à l’encontre de la célébration de la vie… Elle devenait insupportable pour moi.
  • accepter les nouvelles méthodes de management choisies par mon nouvel employeur était impossible. Je voulais garder une autonomie dans mon travail et refusais de participer aux stages d’émulation entres collègues et de me sentir de plus en plus évaluée sur mes résultats (en clair : le pourcentage de réussite et les retours des parents d’étudiants)
  • la course effrénée « métro boulot dodo » commençait à m’épuiser : 3 fois par semaine, je chargeais mon vélo et mon fils dans la voiture, le déposais à l’école à 5 km de chez moi, puis je prenais le train TER avec mon vélo et une fois arrivée à Rennes, il me restait 4,5km à faire : un vrai parcours sportif pour arriver au boulot !
  • l’absence de lien au quotidien avec la nature et la sensation d’enfermement en classe devenaient insoutenables : pendant mes heures de cours, je regardais par la fenêtre lorsqu’il faisait beau en me disant : mince ! J’aurais pu semer mes carottes… j’aurais pu faire ceci, j’aurais pu faire cela… autant de sentiments de frustrations qui alimentent l’aigreur  et l’insatisfaction au boulot !

Il ne me manquait sans doute qu’un déclic…

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