La période que nous traversons n’est pas seulement une crise politique, elle est une crise institutionnelle profonde. Elle est l’aboutissement d’une marginalisation systématique de tous les corps intermédiaires mais aussi d’une confusion délétère, portée a son paroxysme par le chef de l’État, entre présider une république et gouverner un pays. Cette confusion met en danger l’État de droit par son alliance servile avec le capitalisme financier et ouvre la porte du pouvoir aux forces réactionnaires, nostalgiques d’une république qui se voulait empire. On en mesure aujourd’hui les dégâts en Nouvelle Calédonie, ainsi que dans la relation entretenue aux quartiers populaires. Continuer la lecture
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La graine est un bien commun : elle doit le rester.
Dissolution des Soulèvements de la Terre : rétablissement du « délit de coalition »
La dissolution des Soulèvements de la Terre, décidée en conseil des ministres le 20 juin 2023, est un acte qui signe un changement de régime. Elle marque le refus du gouvernement de considérer que les électeurs et électrices sont aussi et d’abord des citoyens et citoyennes doué·es de raison, capables de prendre la pleine mesure de la tragédie que constituent le réchauffement climatique et l’effondrement de la biodiversité et de proposer des solutions; capables de s’engager pleinement, par voie de conséquence, en pensées et en actes. Elle marque le refus par le pouvoir de toute intervention de corps intermédiaires, sauf celles auxquelles il se soumet, comme la FNSEA. Elle fait faire, en somme, un grand bond en arrière à notre république.
L’acte de la dissolution des Soulèvements de la Terre et les menaces pesant sur d’autres mouvements, associations ou syndicats, constituent comme un retour au temps où valait la loi Le Chapelier par laquelle l’État se considérant comme seul garant de l’intérêt général, instaurait le délit de « coalition ». Depuis son instauration en 1791, il fallut plus d’un siècle pour que notre république soit enfin décrétée comme une république « démocratique et sociale » dans l’article premier de sa Constitution. Et un peu plus pour que la Charte de l’environnement de 2004 soit inscrite dans le préambule de la Constitution; la charte précisant bien :
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que la diversité biologique, l’épanouissement de la personne et le progrès des sociétés humaines sont affectés par certains modes de consommation ou de production et par l’exploitation excessive des ressources naturelles ;
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que la préservation de l’environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation.
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que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » (Article 1er)
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Et que « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement » (Article 2)
A ce titre, la dissolution des Soulèvements de la terre est un grand bond en arrière pour notre république. Elle s’opère dans la continuité d’une politique d’État d’urgence permanent instaurée depuis 2015 et d’une démocratie sous contrôle ce qui, comme le souligne le conseil d’État, est loin d’être de bon augure : « Sur le long terme, son usage est délétère : il déstabilise le fonctionnement ordinaire des institutions, en bouleversant le rôle du Parlement et des institutions territoriales, banalise le risque, restreint les libertés de façon excessive et altère, à terme, la cohésion sociale. »
La criminalisation des oppositions est d’autant plus inquiétante dans un contexte de renforcement des moyens de police où de nouvelles prérogatives lui sont accordées (entre autres, celle de pouvoir activer à distance tout appareil électronique, adoptée au mois de juin par l’Assemblée). Elle révèle l’état de fragilité d’un gouvernement incapable de réagir, sans déni ni violence, au fait qu’il n’y aura pas de croissance verte.
Nous sommes aujourd’hui gouvernés par des « spécialistes de la solution des problèmes », pour reprendre les termes d’Hannah Arendt à propos des membres de la commission Mac Namara, secrétaire d’État à la défense des USA, qui refusaient d’appréhender la réalité de la situation militaire sur le terrain de la guerre du Vietnam pour préserver « l’image » que les Américains se faisaient de leur pays. Faute d’arguments politiques, ce sont des arguments d’autorité qui prévalent pour le gouvernement qui considère que toute opposition à sa politique est un ennemi de l’intérieur.
Devant un tel durcissement autoritaire, nous n’avons pas d’autres choix que de faire preuve de sang-froid pour ne surtout pas se laisser exclure du champ politique et bien continuer d’agir comme des individus doués de raison, solidaires vis à vis des personnes les plus exposées par leur engagement, en pleine possession de nos capacités de penser et en droit de s’organiser pour produire de l’intérêt général. Plus que jamais, le mouvement écologique doit renforcer ses liens avec les femmes et les hommes engagés dans le monde du travail et des métiers. Face à un gouvernement dénué de toute capacité de penser, parce que coupé de la société, il reste à faire politique au niveau des territoires, à notre échelle, avec tous les habitant.e.s déterminé.e.s à ouvrir des espaces de dialogue, de recherche et de production qui nous épargnent la division et la guerre.
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Lire aussi : Minga, signataire de l’appel unitaire Sortir de l’Etat d’urgence (dec. 2015); Minga soutient « l’Appel des Soulèvements de la Terre (mars 2021)
1er mai 2023
Une fête populaire pour l’avenir de notre République démocratique et sociale.
L’exceptionnel mouvement social dressé contre la réforme des retraites s’est appuyé sur une unité syndicale déterminée, soucieuse de représenter le monde du travail et des métiers dans sa diversité et de mobiliser des foules humaines et citoyennes, en manifestations larges, massives, impressionnantes de dignité et de responsabilité. Un vibrant appel à la démocratie sociale comme pilier de notre République.
Cette résistance unitaire montre qu’aucune issue politique positive à une crise provoquée par le chef de l’État n’est concevable si elle ne vient pas du monde du travail, si elle n’est pas portée par l’ensemble du monde du travail, par les salariés, les étudiants, les gens en activité, en retraite et par ceux qui sont privés d’emploi.
Cette force démocratique qui s’est levée contre cette réforme, il nous faut continuer de la déployer face à un chef de l’État qui a oublié que sa fonction première est d’être le Président d’une République qui est le bien du peuple. Aucun progrès démocratique, aucune transition écologique ne sont possibles s’ils ne sont pas portés par le monde du travail et des métiers.
La fête du 1 mai qui active la mémoire du mouvement ouvrier ne défend pas seulement les droits de ceux pour qui le travail est la principale ressource, elle est aussi porteuse d’un projet qui s’adresse à l’ensemble de la société, et qui permet de vivre ensemble, c’est-à-dire de faire vivre l’esprit de notre république.
Quand le gouvernement et le président conduisent une politique qui vise à nous faire oublier que nous sommes des êtres de raison, maîtres de leur savoir, et citoyennes et citoyens libres et égaux d’une République, alors il est de la responsabilité de l’ensemble des organisations syndicales de maintenir l’unité et de l’élargir aux corps intermédiaires, avec l’ensemble des élu.e.s du pays, notamment les élu.e.s locaux qui représentent la République au plus près des habitant.e.s.
Minga, le 26 avril 2023
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