La région Bretagne, terre paysanne, a vu en quelques décennies le nombre de petites fermes familiales en polyculture élevage disparaître au profit de fermes usines. En dissociant la terre, du capital et du travail, les politiques agricoles successives ont détruit une profession agricole fondée sur l’exploitation familiale au profit d’un modèle d’intégration où l’agriculteur·trice n’est plus maître de ses choix de cultures, des conditions d’élevage et endure des conditions de travail inhumaines.
Grâce à Yveline et une partie de sa famille et ses ami·e·s, la ferme de Coat Kéroec a résisté à cette tendance funeste, refusant que la terre soit séparée des bâtiments.
La ferme de Coat Keroec n’est pas seulement un lieu de production, c’est aussi lieu de vie où l’on travaille avec les vivants (et non contre eux), qui accueille toutes celles et tous ceux qui souhaitent apprendre le métier d’agriculteur·trice.
En réduisant le cycle de l’azote, en fixant le carbone dans le sol, la ferme de Coat Kéroec est en prise avec les enjeux contemporains, pour accompagner les changements alimentaires auxquels la région Bretagne ne peut se dérober.
Pour faire que toutes les agricultures soient biologiques,
la lutte et l’initiative, ça marche ensemble.
Un des aspects de la dépolitisation si préoccupante face à l’affaissement démocratique, face aux crises sociales, face aux menaces liées au changement climatique, est le discrédit général jeté avec virulence sur des actions militantes dites « radicales ». Le reproche fait à leurs auteurs est qu’ils perdent l’objectivité et la réflexion nécessaires alors que c’est précisément une analyse parfaitement objective de la réalité qui les conduit à mener des actions spectaculaires, en toute responsabilité, et ce dans le but délibéré de provoquer le débat politique.
La pétition, plus consensuelle, «Nous voulons des coquelicots» lancée en 2018, a certes recueilli 1 135 134 signatures. Cependant, quatre ans plus tard, l’usage des pesticides s’est malheureusement développé ; l’expression « agribashing » s’est imposée, en même temps que se mettait en place la cellule de gendarmerie « Déméter ». Et l’agrobusiness continue de tuer, rapidement ou à petit feu, celles et ceux qui y travaillent autant que celles et ceux qui en consomment les produits (cf. œufs en chocolat Kinder, pizzas «Fraîch’Up» de Buitoni du groupe Nestlé, pour ne citer que les exemples les plus récents).
Le silence politique quasi général sur le sujet est assourdissant, comme est indigne la condescendance ou la lâcheté à l’égard du monde agricole.
Une agriculture biologique ne peut pas se développer uniquement par le marché. Elle doit surtout, en Bretagne comme ailleurs, se confronter à un agrobusiness qui exploite les agricultrices et les agriculteurs, les salarié.e.s, qui chosifie l’animal, qui ignore délibérément la vie des écosystèmes. Cette confrontation passe forcément par des modes d’actions spectaculaires qui visent à provoquer le débat. Elle passe aussi, nécessairement, par des solidarités militantes et des coopérations de proximité.
Le 19 mars 2022, le collectif « Bretagne contre les fermes usines » a mené une action de blocage d’un train de céréales à Noyal-Pontivypour en déverser des dizaines de tonnes d’un blé destiné à l’élevage intensif, érigeant pour cela, symboliquement, « un mur en travers des voies de l’agro-industrie ».Toutes celles et ceux qui travaillent et militent pour rendre biologiques toutes les agricultures, pour le respect des conditions de travail, du bien-être animal, des sols, des océans, des rivières et des rives, ne peuvent qu’être solidaires de cette action d’intérêt général, vital.
La hausse du prix de l’énergie et de denrées alimentaires, couplée à des ruptures d’approvisionnement (bois de construction, composants électroniques, etc.), est une réalité bien concrète dans la vie quotidienne de bon nombre d’entre nous. Nous vivons tous une hausse brutale de l’inflation inédite depuis plus de 40 ans, tellement inquiétante et lourde de conséquences sociales qu’elle est paradoxalement peu présente dans le débat public et absente du débat électoral. Seul un chèque de 100 € de compensation est proposé sous condition de ressources!
La transition économique des territoires, directement impactée par l’inflation, ne fait l’objet d’aucun investissement politique ambitieux.
Alors que le prix des engrais azotés a été multiplié par trois en un an, les politiques en matière de transition écologique restent arc-boutées à la « croissance verte » :
Des drones, des méthaniseurs, des gadgets numériques mais rien pour mettre à profit les départs en retraite massifs (près de la moitié des exploitants agricoles d’ici 10 ans), rien pour faciliter l’installation des jeunes en agriculture par une réforme foncière ambitieuse (plafonnement de la taille des exploitations, offices fonciers, bail de carrière, dissuasion fiscale de changement d’affection des sols…). Résultat, beaucoup d’entre eux paient au prix fort leur installation : RSA pendant des années, conditions de logement indignes, etc.
Ce sont des logiques de massification, de flux tendu et de « juste à temps » qui aménagent le pays, avec le déploiement des « market places » comme Amazon, la concentration des flux de marchandises autour de HUBs portuaires (le Havre, Amsterdam) au prix d’une évolution exponentielle du fret routier, au détriment du ferroviaire et du maritime côtier. Comment s’étonner alors que les ports de la façade atlantique soient délaissés ou en déclin ?
Il est pourtant clair que la massification des flux par des porte-containers géants n’empêche nullement les ruptures d’approvisionnement et qu’elle est totalement antinomique avec la réduction drastique des émissions de GES dans laquelle nos sociétés doivent s’engager par un développement économique territorial plus résilient.
Tout comme la crise sanitaire et la crise environnementale, la forte inflation ne sera pas une parenthèse. Elle marque sans doute la fin de la mondialisation marchande, mais pas forcément celle de la globalisation économique. En attendant, nous sommes engagés dans une transition sauvage et elle est déjà très douloureuse pour bon nombre d’entre nous.
Il y a urgence à rejoindre les luttes et les initiatives de citoyenneté économique qui font face et répondent localement au défi climatique, aux inégalités, à l’accueil de migrants, à une liberté d’expression de plus en plus surveillée et menacée.
Soyons encore plus solidaires entre nous, mais aussi nettement plus ambitieux dans nos objectifs de transition, et nettement plus exigeants politiquement envers ceux qui sollicitent nos suffrages .
La toute récente convention passée entre Graines de liberté – Hadoù ar frankizet Terra Libra indique bien que l’on peut concevoir des filières professionnelles où la satisfaction d’un besoin ne se fait pas au détriment du travail et des métiers de celle ou celui qui tient à y répondre, ni de leur environnement. Ici, des femmes et des hommes qui sèment, élèvent, récoltent, trient, testent, stockent, ensachent, livrent des semences de variétés-populations, conseillent la clientèle et administrent ces initiatives.
Nous invitons les commerçant·e·s, associations, entreprises, particulier·e·s à participer au développement de cette filière; par la promotion et diffusion de ces semences variétés population, libre de droits, reproductibles cultivées en Bretagne par l’achat des graines disponibles chez Terra Libra :