A travers le récit de son itinéraire personnel et professionnel, c’est une conviction forte que partage aujourd’hui Stéphanie fondatrice de la pépinière « Des fruits, des fleurs » : celle d’approfondir notre humanité par une relation aux plantes, sensible et pensée.`
« Avant d’exercer le métier de pépiniériste, j’étais formatrice en prépa kiné à l’institut régional sport et santé de Rennes. Pendant 12 ans, j’ai accompagné 5 classes de 40 élèves dans la préparation de l’épreuve de Sciences Physiques du concours. Il fallait créer dans les groupes une émulation telle que les élèves parvenaient à un niveau de performance et d’autonomie incroyable ! Je pouvais alors me retirer et n’intervenir qu’auprès des étudiants qui avaient encore besoin d’une aide personnalisée. J’ai adoré ce contact avec les jeunes ! C’était plus un métier de coach que de prof. Le rythme était extrêmement soutenu avec des tranches de 4 heures de « cours », des devoirs surveillés chaque semaine, des concours blancs 4 fois dans l’année ! On imagine pas le travail de préparation et de correction qui correspond, d’autant que chaque étudiant aime se sentir unique et qu’il faut personnaliser les corrections afin de mettre en lumière les points forts et les points faibles de chacun. Mon année de travail était concentrée sur 7 mois, de septembre à avril, ensuite les étudiants partaient pour une longue série de concours… Et pendant ce temps, je cultivais mon jardin.
J’ai quitté Rennes devenue trop chère pour m’installer avec mon fils de 4 ans à 35 km de là, en zone rurale. A l’époque, je louais une maison en terre et pierres ainsi qu’un terrain agricole où j’avais décidé de faire un potager de 2000 m2, avec 2 serres, des légumes, des petits fruits et des fleurs. J’ai commencé à la grelinette et j’ai récupéré des plants en échange de coups de main que je donnais à des maraîchers… Je savais déjà que je n’allais pas continuer d’être formatrice, pour plusieurs raisons…
- travailler dans un secteur qui favorise la compétition, la sélection, l’élitisme, devenait trop difficile pour moi : accompagner les élèves suppose aussi de les soutenir dans les moments difficiles. Avec le stress et cette ambiance de concours, certain(e)s d’entre eux développaient des pathologies psychosomatiques : anorexies, crises de tétanie, burn out, dépressions pouvant aller jusqu’à l’hospitalisation, addictions… En les écoutant et en essayant de leur parler, je me rendais compte que j’étais complice d’un système déshumanisant et que cette stratégie du mérite frappait injustement des jeunes qui allaient jusqu’à perdre totalement confiance en eux et risquer de sombrer. Cette démarche allait à l’encontre de la célébration de la vie… Elle devenait insupportable pour moi.
- accepter les nouvelles méthodes de management choisies par mon nouvel employeur était impossible. Je voulais garder une autonomie dans mon travail et refusais de participer aux stages d’émulation entres collègues et de me sentir de plus en plus évaluée sur mes résultats (en clair : le pourcentage de réussite et les retours des parents d’étudiants)
- la course effrénée « métro boulot dodo » commençait à m’épuiser : 3 fois par semaine, je chargeais mon vélo et mon fils dans la voiture, le déposais à l’école à 5 km de chez moi, puis je prenais le train TER avec mon vélo et une fois arrivée à Rennes, il me restait 4,5km à faire : un vrai parcours sportif pour arriver au boulot !
- l’absence de lien au quotidien avec la nature et la sensation d’enfermement en classe devenaient insoutenables : pendant mes heures de cours, je regardais par la fenêtre lorsqu’il faisait beau en me disant : mince ! J’aurais pu semer mes carottes… j’aurais pu faire ceci, j’aurais pu faire cela… autant de sentiments de frustrations qui alimentent l’aigreur et l’insatisfaction au boulot !
Il ne me manquait sans doute qu’un déclic…
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